vendredi 11 septembre 2015

Actulaités

Excellente analyse critique publiée le 10 septembre 2015 par le blog Stalker sous la plume de Grégory Mion

Crédit photo AFP

Une dissection argumentée du roman qui en dégage les bases et la profondeur. Un grand merci à Grégory Mion pour cette mise en perspective sur le site de Stalker, du troisième volet de son analyse : L'Amérique en guerre dans le roman. Prenez le temps de lire l'article sur le blog que vous ayez ou non lu Chronique des jours de cendre de Louise Caron, la réflexion va bien au delà de ce livre.

"Pour le dire autrement et dans l’idée du phénomène de la guerre, il s’agit moins pour l’écrivain de travailler sur «ce qui apparaît» que sur «ce qui aurait pu apparaître» et que les discours officiels ont manqué de voir ou ont sciemment expurgé de leur contenu. Selon ces quelques prescriptions littéraires de bon aloi, la romancière française Louise Caron, dans son roman Chronique des jours de cendre (1), raconte la guerre en Irak de l’époque George W. Bush Jr., ceci à partir du 9 janvier 2007 du calendrier grégorien, correspondant au 19 Dhou-al-hijja de l’an 1427 du calendrier hégirien (cf. p. 9). L’opposition brute de ces deux perceptions du temps pose habilement l’antagonisme culturel de deux mondes en lutte, d’une part l’Irak qui semble régresser dans ses conflits successifs et la mise en doute de son aptitude à fonder une civilisation homogène, et d’autre part les États-Unis, figuration d’un Occident qui avance trop vite dans ses certitudes, arbitre maladroit d’un contexte autrement plus riche que ce qu’ils veulent bien en dire."

"En effet, Chronique des jours de cendre donne l’impression d’une élaboration tragique, en cela que les personnages évoluent finalement dans un petit périmètre (le microcosme typique de la tragédie, situé à Bagdad et dans ses périphéries), en cela aussi qu’ils s’expriment la plupart du temps dans un registre de la déploration, en cela encore qu’ils semblent agir avec une constante frénésie, laquelle s’apparente à une lutte intense contre des forces délétères qui doivent fatalement finir par triompher. Ainsi chacun d’entre eux, mais Sohrab et Barnes plus que les autres, sont comme attirés par un entonnoir, par un œil du cyclone qui les condamne à une sombre finitude, comme s’ils étaient téléologiquement obligés par une catastrophe inévitable. En ce sens, le roman fait songer à une construction théâtrale, avec une mise en scène et des dialogues très cadencés, très équilibrés, et même si les descriptions atmosphériques sont toujours crédibles, elles pourraient quelquefois se confondre à un décor, à une toile de fond dépliable, surtout avec ce ballon dirigeable US qui survole Bagdad et qui enregistre tous les mouvements (cf. p. 196) (5), peut-être aussi toutes les empreintes thermiques, ce ballon-panoptique qui pourrait être la poursuite de la salle de théâtre, la lumière zénithale qui éclaire par-delà les cendres et qui nous révèle chaque fois les acteurs dans la vérité la plus nue, celle, donc, du tragédien qui s’affronte à la mort. "

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