ièce pour 2 F et 1 musicien (ne)
Projet de création
Comédiennes
La mère, Eléonore : Nadine DarmonLa fille, Léa : Séverine Cojannot
Note d’intention de l’autrice
En dépit de la libération actuelle de la parole des femmes, le viol au sein du couple est toujours un sujet tabou, une brutalité destructrice trop souvent assimilée à un droit, une servitude dont le mari/ le compagnon use à sa guise sans consentement préalable au nom d’un contrat sans fondement qui soumettrait la femme à l’homme.
La pièce Les Silences est née d’un désir, celui de mettre en mots avec plus de poésie que d’invective ce qui est indicible : l’histoire d’un amour mort, la honte intime du viol par celui qu’on a jadis aimé. Comment raconter la destruction et les dommages collatéraux pour la famille ? La première question a été le choix de la forme. J’ai écarté le témoignage réaliste préférant aborder le sujet au travers d’une sorte de chorégraphie textuelle, une danse de mots. À petits pas chassés les personnages (une mère et sa fille : Éléonore et Léa) s’évitent, s’affrontent, s’éloignent pour mieux se rejoindre peut-être. Les propos qu’elles échangent résonnent dans les corps et les cœurs au rythme du langage. Les deux femmes sont réunies à Paris par le coma d’Antoine, l’ex-mari d’Eléonore. L’une et l’autre (l’une universitaire, l’autre avocate) n’ignorent rien du pouvoir de la dialectique, de la stratégie d’évitement, parlent beaucoup avec humour, dérision, provocation, s'opposent sur des peccadilles afin de ne pas se dire l’essentiel qui briserait le mur invisible des secrets. Et sous le flot des paroles, le cortège des silences qui détruisent la relation entre elles.
La pièce réduit l’espace-temps à trois jours, dans trois lieux métaphoriques.
- Un musée d’Art moderne, endroit sans affect, où au milieu de l’abstraction froide des tableaux, les personnages cherchent dans une sorte de continuum verbal une voie qui paraît sans issue : se parler pour de vrai et tenter de se comprendre.
- Une plaine de jeux dans un square parisien, lieu des souvenirs, de la vie avec Antoine, de l’amour heureux avant qu’il ne devienne cauchemardesque. C’est aussi le lieu de Léa petite, déjà ensevelie sous les vérités qu’on lui cache, avec la merveilleuse capacité des enfants à s’échapper dans le rêve vers un monde où ils peuvent vivre.
- L’enceinte d’un tribunal où la pièce prend fin, sans jugement. Une fois les vérités dites, admises, la porte peut s’ouvrir sur l’avenir sans préjuger de ce qu’il sera.
Les dialogues sont écrits en langage soutenu dans l’idée qu’ils soient porteurs de jeu pour les comédiennes.
Aujourd’hui où le théâtre est lui aussi réduit au silence, il me paraît plus jamais nécessaire d’écrire sur des questions sociales et politique, de transmettre des émotions aux spectateurs, d’ouvrir des voies de réflexion pour mieux appréhender la complexité des rapports humains, en particulier entre les hommes et les femmes dans l’instabilité du monde contemporain.
Pour finir je citerai Michel Vinaver : l’écriture dramatique assume une double fonction, la première est de produire une littérature exigeante et la seconde est d’être un initiateur de spectacle. C’est en ce sens que j’ai écrit cette pièce.
Louise Caron, Mars 1021
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